L'Albaicin (ou Albayzin) est l'un des quartiers les plus anciens de la ville de Grenade et constitue avec l'Alhambra (sur la colline d'en face) le coeur de l'ancienne ville médiévale arabe. Celui qui découvre pour la première fois ce quartier l'abordera sans doute par l'une des petites rues en pente qui partent de la calle de elvira ou de la plaza sta ana. En dehors de quelques ruelles commerçantes bondées où se succèdent salons de thé arabes et petites boutiques touristiques, il pénètre alors un dédale de ruelles minuscules (où il est parfois impossible de marcher à deux de front), de petits escaliers déserts et de ruelles pavées transversales. L'endroit a tout d'un labyrinthe à ciel ouvert. On se perd avec bonheur dans ce quartier paisible (une fois qu'on a délaissé les deux ou trois grands axes touristiques), à mesure que l'on progresse dans la pente au milieu de ces maisons blanches. En 2008, lorsque je m'y suis promené durant plusieurs jours, les murs blancs du quartier étaient largement recouverts de superbes graffitis. Voilà qui renforce encore le côté passionnant des lieux : de ruelles minuscules en ruelles minuscules, où il n'est pas question d'envisager la présence d'une voiture, le piéton attentif passe de merveilles en merveilles. Soudain, alors que l'on s'approche du sommet de la colline, alors que l'on se trouve au milieu de cactus, l'on découvre un superbe panorama sur toute la ville de Grenade. On débouche sur quelque superbe esplanade face à l'Alhambra qui se détache devant les montagnes de la Sierra Nevada. Là, des jeunes discutent et jouent de la musique au milieu des habitants du quartier et des touristes. Pour peu que l'on soit curieux (ce qui semble le minimum pour s'adonner à la dérive), on peut découvrir de petites rues entièrement recouvertes de graffitis juste derrière...
Si l'on continue de s'avancer ainsi dans ce quartier, on aborde, sans même s'en rendre compte, le quartier de Sacromonte (historiquement, le quartier gitan de Grenade). Les ruelles et l'aspect des maisons changent peu. On croise de moins en moins de monde, c'est tout. De façon étonnante, on n'y voit quasiment plus aucun graffiti. Les maisons semblent mieux rénovées et on croise de luxueux patios avec une vue magnifique sur l'Alhambra. A mesure que l'on remonte la colline, l'ambiance change, cependant. La ville s'arrête brusquement au moment où la pente se redresse. Tout d'un coup, alors que l'on marchait au milieu des maisons blanches, la rue se transforme en chemin de terre, il n'y a soudainement plus aucune maison et l'on a l'impression d'arriver à la campagne. Alors que l'on s'aventure un peu sur ces chemins (avec une vue magnifique sur Grenade), on découvre que la pente est parsemée de grottes et d'habitations de fortune (une bâche tendue sur deux bouts de tôles ondulées...). L'histoire raconte que le début de la construction de ces grottes remonterait à la fin du moyen-âge. L'endroit est toujours habité. Là, tout au bout de la ville, il ne reste plus qu'à faire demi-tour et qu'à se laisser descendre au hasard des rues et des escaliers... Une fois en bas, vous pourrez remonter vers l'Alhambra, si vous ne craignez pas trop la foule des touristes ou bien vous égarer dans d'autres quartiers superbes de cette ville.
Ci-dessous, quelques photos prises en chemin (cliquez dessus pour agrandir). Le hasard fait que, pendant mon séjour, j'ai croisé une manifestation d'habitants de l'Albaicin qui protestaient contre la spéculation immobilière dont est victime ce quartier et contre les expulsions qui découlent de l'augmentation des loyers. Encore un quartier victime du processus de gentrification, à l'instar de bien d'autres, malheureusement. Un autre quartier en lutte pour se préserver de son embourgeoisement et de son affadissement : en d'autres termes, de sa banalisation et de sa mise sous cloche touristique...